La solidarité européenne suffira-t-elle à la Grèce et à l’UE ?

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L’Union européenne, avec en première ligne la France et l’Allemagne, a enfin déclaré soutenir la Grèce dans le comblement de son déficit. Celui-ci dépasse en effet très nettement ce que l’UE demande à ses Etats membres en application des traités de Maastricht et de Lisbonne, avec 12,9 % de déficit au lieu des 3 % demandés par Bruxelles. La dette publique représente  115 % du PIB grec. Le pays ne sera pas laissé à l’abandon. Il pourra recevoir l’aide du FMI s’il la demande ainsi que des aides bilatérales européennes, à condition qu’il persiste dans son plan de rigueur budgétaire, et ce malgré le fort grondement social s’élevant dans l’ensemble du pays. Mais faut-il vraiment être soulagé ? Outre les risques réels de contagion à d’autres pays de l’Union (le Portugal, l’Espagne et l’Irlande en premier lieu), la crise grecque pose deux questions : celle de la solidarité des pays dans la zone euro et celle de la régulation de la finance au niveau de l’Union européenne

Dans quelle mesure les Etats membres de l’Union doivent-ils rester solidaires ? Le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, a déclaré : « Nous avons toujours fait preuve de solidarité avec tous les Etats membres de l’UE, et nous montrerons qu’à l’avenir la Grèce peut compter sur notre solidarité ». Une démarche que n’approuvent pas l’ensemble des 27, sachant qu’ils devront augmenter leur propre dette et celle de l’UE au risque d’un certain mécontentement de leurs propres opinions. Il s’agira là forcément de démarches volontaires puisque le traité de Maastricht prévoit qu’aucun Etat ne peut être forcé à en secourir un autre.

Or, le traité de Lisbonne prévoit dans ses articles la suppression des droits de vote pour les pays ne suivant pas les règles budgétaires communes, voire même leur expulsion en cas d’atteintes multiples aux principes démocratiques européens. L’Allemagne souhaiterait d’ailleurs élargir cette possibilité aux multiples dérapages économiques afin de sortir des Etats de la zone euro. Des mesures plus coercitives aideraient peut-être plus les Etats à tenir une gestion plus stricte de leur économie ?

Cette crise ne montre-t-elle un pan manquant à l’UE ? Les gouvernements ont répugné jusqu’à présent à s’effacer devant un gouvernement économique commun. Les plus libéraux ont même bloqué toute évolution car ils espéraient faire jouer une concurrence fiscale entre les vingt-sept et organiser une baisse des impôts et de la protection sociale. Asphyxiée par plus de vingt ans de désinflation compétitive l’Europe risque fort de ne pas résister aux  marchés prêts à dégommer l’euro. On savait que l’euro ne ferait pas l’Europe. Il représente cependant encore cette monnaie unique qui devait permettre à l’UE de se battre à armes égales avec l’Amérique et les puissances asiatiques. Après les échecs diplomatiques successifs de Copenhague et de Doha l’UE frise l’humiliation en devant s’en remettre au FMI pour régler un problème interne. L’aveu est fait qu’elle ne peut s’en sortir seule et que les pays qui la composent se préoccupent plus de leur destin personnel que du destin collectif.  Le politique semble crispé entre une opinion publique fixée sur son pouvoir d’achat et les marchés obsédés par la rentabilité.

Si l’UE veut survivre elle sera forcé de se réinventer, plus politique et plus solidaire, plus inscrite dans une logique fédérale. Portées par la déroute libérale, les gauches européennes ne doivent pas avoir peur de proposer l’accélération de l’harmonisation économique ainsi que des mesures fortes  qui  tordront le cou à la crise comme l’avait fait Roosevelt en encadrant la spéculation sur les marchés des produits dérivés et en décourageant les excès de la cupidité par des taux élevés d’imposition.

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