Réflexions 10 jours plus tard

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En ce jour de célébration de la déclaration unanime des treize Etats unis d’Amérique par lequel les treize colonies faisaient sécession de la Grande-Bretagne le 4 juillet 1776, j’ai envie de revenir sur le "Brexit" et les deux sentiments qu’il a fait naître en moi.

D’abord le regret de réaliser que ce grand pays, le Royaume-Uni, à l’origine du parlementarisme européen, puisse – par le bien d’une procédure référendaire dont l’objet même est d’être instrumentalisée par ceux qui décident d’y recourir – penser ne rien avoir à apporter au grand projet européen. La vision réductrice de l’Union qu’il a toujours portée, celle d’un grand marché, ne l’empêchait cependant pas de coopérer pour relever les enjeux climatiques, migratoires et économiques qui ne sont plus du seul ressort des pays mais ne peuvent être abordés qu’au niveau continental et planétaire. L’insouciance de ses dirigeants qui ont depuis fait la démonstration de leur manque de courage autant que de leur cynisme ne peut être la seule explication au fait que cette grande île, depuis le 23 juin, semble partie à la dérive. Sont apparues alors les profondes divisions d’une société scindée en blocs, séparés par des fossés qui se creusent au niveau régional, générationnel, des classes sociales et au sein même des partis et dont les premiers motifs, soyons honnêtes, sont au sein même de la société anglaise. Les égoïsmes sont le reflet de ce qui se joue au niveau des pays où chacun dans cet individualisme effréné cherche à s’imposer à l’autre quitte à ce que tous y perdent.

Ensuite, le sens d’une opportunité à saisir à la fois pour la classe politique et les peuples européens qui pourraient en tirer les enseignements. Le référendum ne permet pas un débat de fond puisque la question posée est fermée et les Français plus que d’autres le savent. Césarisme impérial ou pratique gaullienne tendant à écarter le parlement, pratique pompidolienne ou chiraquienne tendant à diviser l’opposition dans une perspective présidentielle. Le référendum n’est jamais ce que l’on croit. Dans tous les cas, jusqu’à présent, sa tenue a entrainé des profondes divisions qui laissent des traces durables. Tous les contestataires, férocement opposés les uns aux autres, se retrouvent pourtant unis pour dire "non". Alors pourquoi la course à l’annonce de tous ces potentiels candidats à la présidentielle? N’ont-ils rien retenu de la désinvolture d’un certain David Cameron qui marquera l’histoire pour avoir fait sortir son pays de l’Union européenne pour une simple promesse électorale qu’il pensait ne pas devoir tenir? Plutôt que de combattre les europhobes de son parti, il a cédé à la facilité. A moins que tous ces candidats français ne souhaitent, dès leur arrivée au pouvoir, diviser le pays pour mieux régner et ne pas avoir à relancer le projet européen mais simplement regretter son délitement. Au lieu de ces annonces pour le goût démagogique – car quelle légitimité un président peut-il à avoir à organiser un référendum dans les mois suivant son élection si ce n’est pour attester de son impuissance ? – ils devraient montrer qu’ils ont compris que ce vote est avant tout un cri d’alarme de tous les laissés-pour-compte, de tous ceux qui expriment leur rancoeur contre la classe politique et l’Establishment et qui ne sortent pas grandis de la tragédie shakespearienne qui vient de se jouer; ceux qui sont prêts à se tourner vers les extrêmes en pensant qu’elles les protègeront ; ceux qui ont peur de l’avenir. Si la classe politique ne sait pas comprendre et apporter de réponses maintenant je crains que nous n’entrions dans une période de grande violence dont vous voyons les prémices.

 


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