La diplomatie comme seule solution

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Conformément à l’article 35 de la Constitution, un débat purement consultatif et non suivi d’un vote s’est tenu simultanément à l’Assemblée nationale et au Sénat lundi 16 avril suite aux frappes militaires en Syrie. Je déplore cependant que le Parlement, dans le cadre de sa mission de contrôle de l’action du Gouvernement, ne soit pas davantage associé à la prise de décision concernant nos engagements armés à l’étranger. L’avantage est que nous pouvons intervenir très rapidement mais elle repose sur un seul homme, le président de la République. Avoir recours à la force engage nos soldats sur le terrain mais également tout le pays. Il n’y a pas forcément, au sein de la représentation nationale, une position consensuelle mais le débat permet l’expression de toutes les sensibilités et permet surtout de comprendre les enjeux. 

Suite à l’utilisation avérée d’armes chimiques dans la région de la Ghouta orientale, la France, le Royaume-Uni et les États-Unis ont conjointement frappé trois sites de production, d’assemblage et de stockage de ces armes dans la nuit de vendredi à samedi. Aucune victime n’est à déplorer et aucune catastrophe sanitaire n’a eu lieu suite à la destruction des sites. Il faut espérer que les experts de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) pourront très vite se rendre sur place pour commencer leur travail de contrôle. 

Le 7 avril, à Douma, cette attaque au chlore a fait quarante-cinq morts et plusieurs dizaines de blessés. L’utilisation de telles munitions sert une implacable stratégie meurtrière : il s’agit de déloger des combattants ennemis abrités dans des habitations afin d’engager le combat urbain mais surtout de punir les populations civiles présentes dans les zones tenues par des combattant opposés au régime pour inciter à la reddition.

En dépit de l’engagement de Bachar-el-Assad de démanteler intégralement son arsenal chimique, des sites de production existent encore et cette attaque au chlore est la troisième. A chaque fois, ce sont les mêmes images qui choquent la communauté internationale. Il était donc difficile de rester de simples spectateurs de la répétition de ces tueries et de la violation réitérée du droit international.

Depuis le début de la guerre en 2011, déclenchée après des manifestations sévèrement réprimées par le dictateur syrien, le conflit s’est internationalisé, mêlant grandes puissances et acteurs régionaux dont les desseins sont bien différents et évoluent avec le temps. Alors que le risque d’escalade est à son paroxysme, le premier écueil serait de nous retrouver piégés dans un affrontement de blocs et de voir cette guerre civile muer en conflit ouvert mondial, ce qu’il est déjà. N’oublions pas que l’implication de l’armée française en Syrie n’a d’objectif que la destruction de Daesh, qui avait fomenté une attaque contre notre pays depuis Raqqa.

Lors de son allocution devant le Sénat, le ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a souligné que cette offensive ne marquait pas le début d’une guerre entre la France et le régime de Bachar-el-Assad, mais constituait plutôt l’ouverture d’un vaste plan diplomatique, visant l’adoption d’une nouvelle constitution et l’organisation d’élections libres en Syrie (résolution 2254 du Conseil de sécurité de l’ONU). 

Il est indéniable que seule la voie politique permettra un retour à la stabilité dans cette région. Mais ces deux volontés affichées illustrent une ambivalence : celle qui consiste à affirmer que la France n’est pas en guerre contre la Syrie mais contre les groupes djihadistes, « et en même temps », qu’elle s’engagera dans le long terme dans un plan de transition politique qui pourrait être assimilée à de l’ingérence au Levant.

Tout l’enjeu aujourd’hui est de convaincre la Russie et l’Iran de cesser leur soutien indéfectible à Bachar-el-Assad et de rejoindre la table des négociations. Le président de la République se rendra à Saint-Pétersbourg à la fin du mois de mai à l’occasion d’un forum économique, fidèle à la ligne diplomatique qu’il prône depuis le début de son quinquennat, consistant à « parler avec tout le monde ». En effet, notre politique étrangère doit continuer à être guidée par un principe qui constitue son identité : l’indépendance.


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