Article de l’Opinion sur la réforme de la loi de 1905

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Je me suis exprimée pour l’Opinion sur la potentielle réforme de la loi de 1905.

Laïcité : les macronistes proches de la franc-maçonnerie s’organisent pour préserver la loi de 1905

Un groupe de députés travaille à prévenir toute évolution de la loi de séparation des Eglises et de l’Etat

Les faits — Un groupe informel d’une vingtaine de députés LREM s’est réuni mercredi pour lancer un cycle de réflexions sur la loi de 1905 de séparation des Eglises et de l’Etat, afin d’éviter toute réforme du texte fondateur de la laïcité. Parallèlement, selon nos informations, plusieurs sénateurs réclament la mise en place d’une commission d’enquête sur les failles d’application de cette loi.

Que devient le délicat projet de réforme du régime des cultes ? Dossier ajourné, explique l’Elysée en plein débat national. L’exécutif n’y a pas pour autant renoncé. Depuis les révélations dans l’Opinion sur l’avant-projet gouvernemental retouchant la loi de 1905, le texte suit son cours.

Tout au long du mois de janvier, lors de dîners Place Beauvau, le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner en a présenté les grandes lignes aux cultes, aux associations laïques et aux obédiences maçonniques. Sans rassurer. Alors les forces philosophiques et politiques s’organisent pour, le moment venu, sortir du bois… Y compris dans la majorité parlementaire.

Parmi les élus LREM, l’idée de toucher à l’historique loi d’Aristide Briand ne fait pas l’unanimité. Selon nos informations, une vingtaine de députés LREM sont en train de constituer un groupe informel opposé à une réforme. Ils ont tenu leur première réunion mercredi matin, à l’Assemblée nationale, et veulent auditionner des juristes et philosophes pour être prêts le moment venu.

A l’origine de l’initiative, François Cormier-Bouligeon, député LREM du Cher et ex-chef de cabinet ad- joint d’Emmanuel Macron à Bercy. « Il s’agit d’anticiper le débat, explique-t-il à l’Opinion. Nous sau- rions gré au président de la République de lutter contre l’islam politique. Mais aborder ce sujet par la face de la loi de 1905 sur la séparation des Eglises et de l’Etat, non. C’est un pilier qui nous permet de créer du commun. Il serait dangereux et inopportun d’y toucher. » « Cet édifice est le fruit d’un compro- mis historique, les questions de financement et de sécurité peuvent être réglées ailleurs », abonde Jean- Louis Touraine, député LREM du Rhône, membre du groupe.

Porte 5905. Une bataille sourde sur les questions de laïcité agite la majorité depuis le début de la légis- lature. A tel point que les positions des uns et des autres sont caricaturées. D’un côté, les élus proches de Florent Boudié, député de Nouvelle-Aquitaine, ou de la ligne plus libérale d’Aurélien Taché, son collègue de Val d’Oise, sont dépeints par leurs détracteurs en « Groupe de l’islam en France ».

De l’autre, le cercle en voie de constitution baptisé « Porte 5905 », en référence à la loi de 1905 (dans le calendrier maçonnique, elle date de l’an 5905 de la Vraie Lumière). « Il n’y a pas que des “frangins”, le groupe est ouvert à tous les laïques », assure toutefois un député membre.

Ces tensions latentes donnent parfois lieu à des passes d’armes qui agitent le microcosme. Comme en octobre, lorsqu’Aurélien Taché est violemment pris à partie sur Twitter par son collègue François Cormier-Bouligeon qui l’accuse de défendre le communautarisme. « Les trois quarts du groupe sont sur des positions libérales, rétorque le député Taché. Il n’y a pas de fracture dans la majorité, ce sont cinq députés acquis aux idées du Printemps républicain qui tentent de faire passer des choses au forceps contre l’ADN libéral d’En Marche. Cette minorité néo-républicaine est hostile aux religions. »

Commission sénatoriale. Ladite « minorité » a pourtant marqué un point lors du débat sur la loi « pour un Etat au service d’une société de confiance », dite « droit à l’erreur ». Un amendement à l’article 38 visait à retoucher la loi de 1905 pour permettre aux associations cultuelles de « posséder et administrer tout immeuble acquis à titre gratuit ». Autrement dit, d’en tirer des revenus locatifs, comme n’importe quelle association loi 1901. Au final, la mesure controversée a été abandonnée.

En revanche, la semaine dernière, elle a perdu la partie au cours d’un nouvel affrontement. Une poignée de députés LREM menés par Aurore Bergé veulent soutenir l’amendement de l’élu LR Eric Ciotti auprojet de loi Blanquer sur l’école, afin d’interdire les signes religieux « manifestement ostensibles » des accompagnants scolaires. Suspension de séance et rejet massif des députés macronistes.

La petite fronde parlementaire, en voie de structuration chez LREM, ne se limite pas à l’enceinte du Pa- lais Bourbon. Selon nos informations, plusieurs sénateurs réclament la mise en place d’une commission d’enquête sur les failles d’application de la loi de 1905, en amont de l’examen de l’éventuel projet de loi. Cette requête rencontre d’ores et déjà l’assentiment de plusieurs élus, dont Hélène Conway-Mouret, vice-présidente du Sénat. L’ancienne ministre de François Hollande voudrait se pencher sur « le régime souvent dérogatoire dont peut bénéficier sur de nombreux points l’Eglise catholique », et privilégierait une mission d’information conjointe aux deux chambres. D’autres élus suggèrent une commission spé- ciale pour appuyer les débats parlementaires, si projet de loi il y a.


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