Chaque année, dans le cadre du projet de loi de finances 2026, je publie avec mon collègue Hugues Saury mon rapport pour avis sur le programme 146 sur l’équipement des forces armées.
Si le déclenchement de la guerre en Ukraine en février 2022 a mis en évidence l’affaiblissement militaire de l’Europe et la nécessité de mettre un terme à la politique des « dividendes de la paix », l’année 2025 aura été marquée par la multiplication des actions de « guerre hybride » de la part de la Russie sur le continent européen (actions de désinformation, de manipulation et de sabotage, survols de drones et incursions aériennes…) qui ont accéléré une prise de conscience que la Russie pourrait être tentée à brève échéance de tester la solidité de l’OTAN.
Cette nouvelle perception de la menace a été intégrée à la Revue nationale stratégique (RNS) dans son actualisation publiée en juillet 2025 à laquelle la commission a été associée tandis que le sommet de l’OTAN des 23 et 24 juin à La Haye a acté la nécessité de porter l’effort de défense des pays membres de 2% à 3,5% d’ici 2035 et même à 5% du PIB en tenant compte de l’ensemble des dépenses consacrées à la sécurité.
Cette prise de conscience répond pleinement aux préoccupations des rapporteurs qui avaient constaté l’année dernière « une remontée en puissance réelle mais encore insuffisante ». L’année 2024 a été celle de l’adaptation de l’outil industriel et des investissements dans les capacités de production mais les commandes étaient encore trop limitées ce qui avait amené les rapporteurs à s’interroger « sur le caractère suffisant de l’effort financier prévu de manière pluriannuelle compte tenu des besoins urgents de remise à niveau et de modernisation de nos équipements majeurs ».
C’est pour répondre à l’ensemble de ces enjeux que le Président de la République a annoncé le 13 juillet 2025 une accélération de l’effort budgétaire en faveur des armées pour 2026 et 2027 consistant à ajouter aux « marches » de 3,2 Mds€ prévues par la loi de programmation militaire (LPM) en 2026 et 2027 des « surmarches » représentant un
effort de 3,5 Mds€ en 2026 et de 3 Mds€ supplémentaires l’année suivante. Le Premier ministre a indiqué aux parlementaires le 1er décembre 2025 que le volume global des « marches » et « surmarches » pourrait représenter 8 Mds€ en 2028 et 9 Mds€ en 2029 comme en 2030. Le rapporteur spécial, Dominique de Legge, considère que « cette
dynamique est compatible avec l’atteinte de l’objectif d’un niveau de dépenses militaires de 3,5 % du PIB en 2035 – à condition de poursuivre l’effort chaque année (+0,15 % du PIB annuellement) –, soit un budget de l’ordre de 140 milliards d’euros à cet horizon ». La ministre des Armées a, par ailleurs, annoncé le dépôt d’un projet de loi visant à actualiser la LPM au premier semestre 2026.
Concernant les crédits du P146 au cours de la troisième année d’application de la LPM, les autorisations d’engagement (AE) prévues pour la mission « Défense » s’élèveraient en 2026 à 93,1 Mds€, soit une baisse de 0,5 % par rapport à 2025 tandis que les crédits de paiement (CP) s’établiraient à 66,7 Mds€, soit une hausse de 6,78 milliards d’euros (+11,3 %). Sur le périmètre de la LPM (hors pensions), les crédits demandés s’établissent à 57,15 Mds€, en hausse de 6,67 Mds€ par rapport à la LFI 2025.
Cette hausse des moyens bénéficiera particulièrement à l’équipement des forces au travers des programmes d’équipements à effet majeur (+3,36 Mds€), de la dissuasion nucléaire ((+487 M€) et de l’achat de munitions (y compris complexes et téléopérées) pour un total de plus de 2,4 Mds€.

