La réforme de l’éducation nationale ou comment réduire les chances d’égalité et de réussite scolaire des élèves.

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 Curieuse période que la nôtre. Alors que le ministère de l’Education nationale continue bille en tête son projet de réforme du primaire et du secondaire à coups de suppression de postes, de regroupements scolaires, d’augmentation d’effectifs dans les classes, la Cour des comptes présente un rapport fort instructif sur la bonne tenue par le ministère de ses engagements en termes de pourcentage de réussite des élèves. Et oui… Le ministère aussi a des objectifs autres que budgétaires ! Il doit faire en sorte que 100 % des élèves sortent qualifiés ou diplômés à la fin du secondaire, que 80 % des élèves accèdent au niveau du baccalauréat et que 50 % soient diplômés de l’enseignement supérieur. Or, force est de constater que le système éducatif français a échoué à la fois face à ses objectifs de réussite pour tous et de réduction des inégalités sociales. Il ne semble pas aujourd’hui se diriger vers une voie plus favorable. Le chemin que prend la réforme engagée par Luc Chatel ne va pas dans le sens des recommandations adressées par la Cour des comptes.

 

En effet, alors que la Cour des comptes pointe l’aggravation de l’écart entre les résultats scolaires des meilleurs et plus faibles élèves, révélant un problème aigu, spécifique et croissant de traitement de la difficulté scolaire, Luc Chatel demande la suppression des Rased, les réseaux d’aide spécialisée aux élèves en difficulté. Mais il n’y a pas que ça. Sous prétexte que « des études et des expériences récentes indiquent que la diminution des effectifs dans les classes n’a pas d’effet avéré sur les résultats des élèves et que les très petites classes ne s’avèrent pas plus « performantes » », le ministère demande aux inspecteurs d’académie d’encourager les regroupements d’écoles, ainsi que l’augmentation des effectifs au primaire. L’objectif n’est pas l’augmentation des chances de réussite scolaire pour les élèves, mais la suppression de 16 000 postes d’ici 2011.

Or d’autres « études et expériences » ont également montré qu’une organisation différente des conditions de scolarité permet de lutter efficacement contre la difficulté scolaire. Ainsi, les pays de l’OCDE obtenant les meilleurs résultats sont ceux où il y a le moins d’heures de cours mais où l’on développe prioritairement le traitement de la difficulté scolaire comme en Suède par exemple.

C’est là-dessus que je souhaiterais insister. Au lieu de perdurer dans un système éducatif uniforme, il serait intéressant de mettre en place une scolarité plus souple, répondant à la demande des élèves. Outre une base commune à tous, plus limitée dans le nombre de matières obligatoires, celle-ci s’adapterait aux besoins des élèves, en leur offrant l’aide et le soutien dont ils ont besoin dans les matières où ils rencontrent des difficultés. Il est aussi important de réfléchir aux journées surchargées.

 

Notre système éducatif ne parvient effectivement pas à remplir les objectifs de réussite qui lui sont donnés. Par exemple, en 2008, la proposition de bacheliers généraux ou technologiques atteignaient les 51,2% soit moins de 80% de diplômés. De telles conditions ne permettent pas de remplir l’objectif de 50 % d’étudiants diplômés de l’enseignement supérieur.

On pourrait commencer par exemple à se demander si l’on doit envoyer les enseignants les plus jeunes et les moins expérimentés dans les établissements les plus sensibles. S’il est indéniable que la vocation des professeurs est ainsi testée cela peut avoir pour effet que de les décourager. Ce fut mon expérience personnelle. Il faudrait un recrutement plus adéquat, comme cela existe déjà pour les postes en classe préparatoire, pour trouver des enseignants dont le profil correspondrait mieux à ces établissements. Pourquoi décider de l’orientation d’un élève au collège ou au lycée selon ses échecs, et non selon ses réussites ? Pourquoi aujourd’hui la réussite d’un élève dépend tant de l’établissement où il est affecté et des enseignants qui le prennent en charge ? D’autres facteurs socioprofessionnels , culturels, sont à prendre en compte. Néanmoins, la France est l’un des pays où les destins scolaires sont le plus fortement corrélés aux origines sociales et au statut culturel des familles, alors que le système éducatif devrait être garanti d’intégration sociale, d’égalité des chances pour tous.

La réforme de l’éducation nationale doit être repensée pour remettre les élèves et leur réussite au cœur du projet et lui redonner pour base l’égalité sociale qu’il n’aurait jamais dû perdre.

 

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