Le Premier Ministre irlandais discute en ce moment-même avec son parti de sa légitimité à conduire la prochaine élection au Parlement irlandais, qui sera anticipée, probablement en Mars. J’en profite pour partager avec vous un commentaire paru dans l’Est Républicain suite à l’entretien que j’avais eu avec ce journaliste lorsque ce scrutin a été annoncé dans l’urgence, suite à la colère qu’avait suscité l’adoption du plan de sauvetage imposé par l’UE et le FMI.
«Dans l’oeil du cyclone »
LA COMMUNAUTÉ française n’est pas épargnée par la crise financière qui frappe l’Irlande. Explications avec deux Français vivant sur l’Ile.
« C’est effrayant. On a l’impression d’être dans l’oeil du cyclone », constate Hélène Conway. « Il y a une sorte de calme alors que l’on sait que des vents violents sont en train de tout dévaster ». Cette Française installée en Irlande depuis plus de 20 ans a une bonne connaissance de la société irlandaise. Elle est chargée du département des langues au Dublin Institute of Technologie (20.000 étudiants).
Elle est aussi élue à l’Assemblée des Français de l’étranger pour l’Irlande où elle représente la communauté française forte de quelque 20.000 membres.
Une communauté peu présente dans cette petite république insulaire comparée aux 150.000 Polonais ou aux 200.000 Chinois sur une population totale de 4,5 millions d’habitants.
« L’essentiel des étrangers sont venus ici il y a cinq ou six ans quand l’Irlande a connu un formidable essor économique », explique Hélène Conway. « A cette époque, le chômage était de 3 % à peine. Il y avait un boom dans la construction. La croissance était à 14 %. Les jeunes qui sont venus se sont endettés pour acheter des propriétés qui, aujourd’hui, ne valent plus grand chose. Ils sont coincés : la vente de leur maison ne leur permet plus de rembourser les banques ».
Si certaines entreprises françaises résistent bien à la bourrasque financière qui souffle sur l’Irlande, comme Yves Rocher (cosmétiques) ou Servier (laboratoire pharmaceutique), d’autres, plus petites, se sont délocalisées à Londres ou ailleurs.
La crise financière frappe sans pitié tous les habitants. « Tout le monde a eu des réductions de salaire alors que les remboursements bancaires restent les mêmes », constate Hélène Conway. « Chacun se serre la ceinture. Autrefois, on pouvait se faire de l’argent rapidement si on achetait et on revendait au bon moment. Ce temps-là est fini. Finalement, le boom économique apparaît comme un accident de parcours. Les Irlandais en ont bien profité. C’est du jamais vu depuis 1916, date de la création de la République».
Quant aux jeunes qui sortent de l’université, ils savent qu’ils vont être forcés de partir. Ils ne trouveront plus de travail. « C’est une génération qui a connu l’aisance et qui va connaître des difficultés », souligne la représentante de la communauté française. « Le changement a été brutal. D’un mois à l’autre on vous enlève 10 % de votre salaire ». La faute à qui ? « Aux politiques», n’hésite pas à affirmer Hélène Conway. « Les décideurs n’ont pas su imposer un système de régulation du système financier pour encadrer la spéculation mondiale. Mais les Irlandais sont inventifs et capables de relever le défi ».
Marcel GAY