Remplacer la déchéance de nationalité par une déchéance des droits civiques

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Dans le cadre du débat sur le projet de loi de révision constitutionnelle, avec une vingtaine de mes collègues et à l’initiative du Sénateur Richard Yung, nous avions co-signé un amendement dans l’hypothèse où celui sur la suppression de l’article 2 ne serait pas adopté. Cet amendement prévoyait notamment l’inscription à l’article 34 de la Constitution d’une peine de dégradation des droits civiques. Une telle mesure serait proportionnée aux crimes et délits terroristes pouvant être commis sur notre sol.

La déchéance de nationalité divise, elle oppose plusieurs catégories de Français au lieu d’inclure et de promouvoir la diversité. C’est pourquoi, j’ai choisi de soutenir la création d’une peine de privation des droits civiques.

 

Retrouvez ici l’intervention que j’avais prévu de prononcer si l’amendement avait été examiné en séance :

Nous sommes Français à la naissance parce que nos deux parents le sont, mais le droit du sol du pays où nous sommes nés nous en donne la nationalité.

Nous le sommes également parce que l’un de nos parents est Français. La langue et la culture dont nous héritons n’entrent pas en concurrence avec celle du pays de résidence.

Nous le sommes devenus par mariage, ou pour services rendus au "rayonnement de la France". Nous le sommes "par le sang versé" pour certains héros étrangers qui se sont battu pour notre pays.

Dans tous les cas, être Français constitue notre identité, ce que nous sommes partout dans un monde en mouvement. 

Les binationaux sont aujourd’hui plus de trois millions qui vivent hors des frontières. Etre un Français à l’étranger aujourd’hui c’est porter dans son ADN l’ouverture aux autres et le plaisir du mélange qui constitue les bases de la diversité de nos destins. Binationaux, nous le sommes formellement pour le million d’entre nous qui possédons plus d’une nationalité. Les binationaux représentent en moyenne plus de 40% des Français inscrits dans les consulats à l’étranger.

Binationaux, nous le sommes tous intimement, même si nous ne possédons pas formellement une autre nationalité, parce que résider dans un pays étranger crée invariablement un lien émotionnel fort avec ces nations qui nous accueillent.  Ces trois millions de Français que nous rencontrons, vivent pour la plupart un rapport quotidien heureux avec la binationalité. 

Conscients que la gauche au pouvoir a  beaucoup fait depuis 2012 pour faire vivre et enrichir son réseau éducatif et culturel à l’étranger, pour réformer le service public consulaire en le modernisant, pour créer un échelon de représentation de proximité à travers les conseillers consulaires, nous vivons douloureusement le projet de constitutionnalisation de la déchéance de nationalité qui remet en question, pour nous, le droit du sang. 

L’émotion, la passion et parfois la violence des propos utilisés dans les débats sont l’expression qu’avec la déchéance de nationalité, nous touchons à quelque chose de précieux, tout simplement à l’identité des personnes.

Remplacer la déchéance de nationalité par la dégradation civique vise à abolir toute inégalité entre nos compatriotes. Il nous importe de ne pas créer deux catégories de Français. Les binationaux nés Français, les binationaux ayant acquis la nationalité et les mononationaux.

En l’absence de majorité sur notre amendement de suppression de l’article 2, je soutiens la déchéance des droits civiques. Car pour deux individus commettant le même acte, il ne peut y avoir de double peine pour l’un, binational, et pas pour l’autre mononational.

 


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