Retour sur le texte de Protection de la Nation. Pourquoi se positionner contre la déchéance de nationalité ?

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Préserver l’Unité nationale. Tel était le souhait du Chef de l’Etat, au lendemain des attentats terroristes du 13 novembre dernier.

En inscrivant dans la Constitution une peine de déchéance de nationalité, François Hollande voulait que l’ensemble des partis politiques puissent s’entendre sur un même texte.

Depuis, l’unité nationale a vécu et ce projet de loi de révision constitutionnelle de protection de la Nation a été soumis à la sagacité du Parlement.

Il me semble nécessaire de revenir sur les différentes étapes qui ont marqué ce débat.

Le Sénat a voté, contre l’avis du gouvernement, un amendement au projet de révision constitutionnelle pour limiter la déchéance de nationalité aux seuls binationaux auteurs de crimes terroristes, soit une version différente de celle de l’Assemblée.

Le 17 mars nous avons examiné le projet de loi de révision constitutionnelle dont l’objet est d’inscrire dans la Loi fondamentale l’état d’urgence (article premier) et la déchéance de
nationalité pour les personnes condamnées pour terrorisme (article 2).

Cet article 2 avait déjà fait l’objet de trois versions différentes. Dans le projet de loi initial du gouvernement, adopté le 23 décembre 2015 en Conseil des Ministres, la déchéance de
nationalité ne s’appliquait clairement qu’aux binationaux : le texte précisait qu’« une personne née française qui détient une autre nationalité peut être déchue de la nationalité française
lorsqu’elle est condamnée pour un crime constituant une atteinte grave à la vie de la Nation ». Cette rédaction a suscité de vives réactions parmi les députés. Le
Premier ministre a fait modifier cet article afin de ne pas « stigmatiser » les binationaux.

Le 10 février, les députés ont adopté un texte qui ne faisait plus référence aux binationaux. Mais le Président du Sénat, Gérard Larcher, s’est positionné sur la ligne non négociable d’un texte  qui ne doit pas conduire à créer de nouveaux apatrides. Ainsi, une nouvelle rédaction de l’article 2 a été élaborée et votée en Commission des Lois. La formulation revenait à déchoir de sa nationalité toute « personne condamnée définitivement pour un crime constituant une atteinte grave à la vie de la Nation et disposant d’une autre nationalité que la nationalité française ».

Cette nouvelle version sénatoriale revient malheureusement à une sanction qui ne concernerait que les binationaux, même s’ils ne sont pas explicitement nommés dans le texte.

C’est pourquoi j’ai décidé de voter contre. Avec 32 de mes collègues, nous avions même déposé un amendement de suppression de cet article. Amendement qui n’a pas été examiné, par un tour de passe-passe du Président de la commission des lois.

Il est quand même dommage que ce débat ait duré pendant trois mois. Les Français de l’étranger s’en sont saisi et c’est bien normal au vu de la défense de leur identité. Les Français de métropole ne s’y sont pas du tout intéressés.


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