Mon intervention dans l’hémicycle sur la baisse du budget des Armées

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Je me suis exprimée, lors de la discussion générale du Projet de loi de finances rectificative, contre la décision du Gouvernement de priver le ministère des Armées de la solidarité interministérielle pour le financement du surcoût des opérations extérieures.

Voici mon intervention :

Mme Hélène Conway-Mouret.

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues,

je ne pensais sincèrement pas intervenir dans l’examen de ce projet de loi de finances rectificative. Je le fais pour exprimer ma déception et ma profonde incompréhension à l’égard de ce nouveau coup porté à nos armées.

Votre emploi abusif de superlatifs, monsieur le ministre, crée de grands espoirs et provoque une déception d’autant plus grande. Elle crée aussi, dans tous les domaines, un écran de fumée derrière lequel vous vous cachez pour mieux tout casser. Quand il se dissipe, on découvre trop souvent une autre réalité, différente de celle que vous avez annoncée.

Mes propos vont s’inscrire dans ceux du président de la commission des affaires étrangères, Christian Cambon, et de Dominique de Legge. Faisant fi du principe de solidarité interministérielle pour le financement du surcoût des opérations extérieures lancées au nom de la nation, ce sont 404 millions d’euros qui manqueront cette année à la défense.

Cette disposition qui primait jusqu’alors est pourtant inscrite en toutes lettres dans l’article 4 de la loi de programmation militaire, promulguée au mois de juillet dernier. C’est donc en toute bonne foi que nous avons voté ce texte et que nous avons voulu croire dans les promesses qui nous étaient faites, celles d’un effort inédit, d’une remontée en puissance exceptionnelle et d’un renouveau du budget des armées, éléments de langage certes utilisés par tous les ministères, mais qui semblaient appropriés au vu des chiffres annoncés. Il a donc suffi de quatre mois pour balayer cet engagement au détour d’un projet de loi de finances rectificative.

Monsieur le ministre, vous justifiez ce revers par votre volonté de sincérisation et de responsabilisation budgétaire – en tout cas, ce sont les mots-clefs, à en juger par l’utilisation que vous en avez faite dans vos propos. J’entends, dans ce discours, une subtile hâblerie, autrement plus habile que les violentes coupes budgétaires à hauteur de 850 millions d’euros survenues à l’été 2017 qui avaient poussé à la démission le chef d’état-major des armées.

Comment parler de sincérité quand le budget alloué aux OPEX est de 650 millions d’euros, alors que leur coût réel atteint 1,2 milliard d’euros ? Il eût été plus honnête d’annoncer une augmentation du budget des armées pour 2018, non de 1,2 milliard d’euros, mais de 800 millions d’euros. De même, est-ce responsabiliser un ministère que de l’affaiblir en lui coupant ses crédits ?

Derrière ce que l’on nous présente froidement comme un simple exercice comptable, je vois l’impact direct de cette mesure sur nos militaires. Alors que nous leur certifiions hier la préservation de leurs moyens, ils devront aujourd’hui composer avec une baisse de 319 millions d’euros alloués à l’équipement des forces, avec un inévitable report des commandes. Nous connaissons leurs besoins en matériel pour assurer leur sécurité et la nôtre, mais ils devront encore attendre.

Je regrette que l’engagement que nous avons pris collectivement avec la LPM au mois de juillet dernier soit foulé aux pieds, que le vote du Parlement soit rendu caduc et, surtout, que notre crédibilité soit ainsi perdue à l’égard de nos armées. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Christian Cambon applaudit également.)


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