PLF 2019 : mon intervention dans l’hémicycle sur la mission action extérieure de la France

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Lors de l’examen du projet de loi de finances 2019, j’ai pris part au débat sur la mission action extérieure.

J’ai déposé avec mes collègues sénateurs du groupe socialiste des amendements en faveur de l’augmentation de l’enveloppe des bourses, d’une hausse du budget de l’AEFE, en vue d’un rétablissement des crédits à hauteur de 10 millions d’euros pour notre réseau diplomatique à l’étranger. Malheureusement, le gouvernement a rejeté ces amendements qui auraient pourtant amélioré la qualité de nos services publics pour nos concitoyens établis hors de France tous les étrangers pour qui nos consulats sont un premier contact. Néanmoins, un amendement ayant pour objectif l’augmentation du plafond d’emploi pour nos établissements à l’étranger a été accepté. Ceci permettra aux écoles françaises de pouvoir répondre à la hausse du nombre d’élèves scolarisés.

Je suis également intervenue dans la discussion générale :

Monsieur le Président,

Monsieur le Ministre,

Monsieur le président de la commission,

Monsieur le rapporteur,

Mes chers collègues,

Monsieur le ministre,

Vous êtes à la tête d’un grand et beau ministère mériterait d’être

au cœur de l’État parce qu’il est d’abord le ministère de la paix. Nous en avons plus que jamais besoin. Notre pouvoir d’influence à l’international reste fort parce que nous avons fait le choix, fruit d’une longue tradition, d’être présent physiquement grâce à notre réseau diplomatique et consulaire, considéré comme l’un des premiers au monde ainsi qu’à notre présence culturelle, éducative et économique.  La France compte. On nous fait confiance parce que nous allons au contact porter notre voix et vous êtes le premier à montrer l’exemple. C’est bien notre force de persuasion et d’attraction qui a fait de la COP21, un formidable succès pour notre pays.

Pourtant, notre diplomatie souffre d’une vision obsolète du rôle de l’Ambassadeur qui se traduit par des choix budgétaires qui ne sont guère en faveur du Quai d’Orsay, traité depuis longtemps par le ministère des finances comme une variable d’ajustement.

Cela se traduit, entre autres, par la vente et le retrait de nos antennes et certaines missions à l’étranger qui entraînent immédiatement une baisse de la présence française, toujours très mal perçue par nos ressortissants et les autorités des pays concernés. Mais si vous vous inscrivez dans un mouvement qui n’est pas nouveau, son ampleur l’est.

Monsieur le Ministre, vous nous annoncez une ponction inédite de 10% sur la masse salariale de toutes les missions, ce qui va entraîner d’importantes suppressions de postes.

Vous en conviendrez on nous impose un vrai massacre à la calculette. Les effectifs concernés – 130 pour 2019 – sont issus de plusieurs ministères. Néanmoins, six de vos collègues au Gouvernement et pas des moindres (les ministres de l’action et des comptes publiques, de l’économie et des finances, de l’agriculture, des armées, de l’intérieur et de la transition écologique) ont d’ores et déjà annoncé qu’ils refusaient de se laisser imposer de futures suppressions de postes internationaux par votre ministère.

Allez-vous devoir être forcé de concentrer ces économies sur le seul Quai d’Orsay ? 

Alors si les suppressions demandées à notre réseau étaient supportées majoritairement par votre ministère, elles entraineraient indéniablement la fermeture de nombreuses Ambassades et Consulats et mettraient fin d’un coup à ce que nous avons laborieusement construit depuis longtemps.

Cela nous amènerait également à entamer de longues négociations pour payer des primes de licenciement à des personnels recrutés localement qui ont souvent fait toute leur carrière au service de la France.

Les économies réalisées risquent fort de nous coûter très cher dans le long terme. L’image de la France sera également ternie.

Dans ce contexte, Monsieur le Ministre, pourriez-vous me préciser quelles sont les intentions du Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères quant à cette politique de suppressions de postes ?

J’imagine que la dématérialisation et l’externalisation vont être accélérées alors qu’elles ne peuvent être appliquées partout. Je regrette le choix d’un service public d’où disparaît progressivement le contact humain pour des raisons comptables. Heureusement, que nous avons nos 442 Conseillers Consulaires qui sont nos meilleurs liens de proximité avec les Français établis hors de France, qui sont élus pour les conseiller et qui les accompagnent très souvent dans leurs démarches administratives. Il semblerait que nous aurons de plus en plus besoin de ces femmes et de ces hommes, élus locaux et indispensables au maintien d’un lien social essentiel dans nos communautés.

Dans cette discussion générale, je voudrais maintenant parler de l’enseignement.

Nous avons 497 établissements implantés dans 197 pays, gérés par l’Agence de l’Enseignement Français à l’Étranger. 350 000 élèves y sont scolarisés, avec une augmentation de 2% par an de ces effectifs.

Après l’annulation de 33 millions d’euros des crédits de l’A.E.F.E. en 2017, le taux de participation financière complémentaire versé par les établissements conventionnés est passé de 6 à 9 points en 2018 pour compenser cette baisse. Ce sont les familles qui ont été mises à contribution avec une augmentation des frais de scolarité.

Il n’est donc pas logique de conserver une enveloppe des bourses à budget constant alors que la demande croît de par l’augmentation des frais de scolarité et de par la hausse de 3% par an de nos communautés françaises présentes à l’étranger.

Le Président de la République a annoncé vouloir doubler le nombre d’apprenants de français dans le monde. Nous avons donc besoin de plus d’établissements pour les accueillir, nécessitant plus de moyens financiers et humains.

Or, la décision d’arrêter soudainement la garantie de l’État accordée jusqu’alors par l’Association Nationale des écoles françaises de l’étranger (ANEFE) bloque aujourd’hui l’agrandissement de certains établissements et ne permettra pas à d’autres de contracter les prêts nécessaires.

Un remplacement de ce système de garantie est-il aujourd’hui recherché afin de sortir ces établissements de l’impasse dans laquelle ils se trouvent, qui engage leur stabilité financière et l’avenir scolaire des élèves qui y sont scolarisés ?

Ce retrait de l’État est-il la première étape vers la recherche d’investisseurs privés qui se substitueront à lui ? 

Si le doublement du nombre d’élèves semble reporté à 2030 dans les documents budgétaires du PLF 2019, ce qui diffère de l’engagement présidentiel d’origine, cet objectif ne pourra être atteint que si le recrutement des professeurs et surtout leur détachement est planifié. Or, la réduction du nombre des enseignants après cinq ans d’augmentation, la circulaire limitant leur détachement ne vont pas dans le sens de la hausse conséquente du nombre de détachements dont le réseau aura besoin.

Sans compter les postes nécessaires au réseau de la Mission laïque française, conseillers culturels, directeurs d’Alliance Française et d’Institut Français.

L’ambition constante du président de la République à déployer une diplomatie universelle et des services consulaires de qualité pour nos compatriotes établis hors de France est donc incompatible avec son engagement de réduire, en même temps et dès 2019, le budget du Ministère sur ces missions essentielles à notre service public.

C’est l’image et le rayonnement de la France qui sont en jeu partout dans le monde.

 

 


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